Soins et evolution
Anciennement, les personnes atteintes de troubles autistiques, appelés plus communément « autistes », étaient associées avec le groupe des arriérés mentaux. Le terme « autisme » dérive du mot grec, autos. Dans la société actuelle, ces deux mots ont dérivé et pris un sens insultant pour les familles et les personnes atteintes. A l’époque, n’étant pas considérés comme atteints de trouble autistiques mais plutôt comme des « fous », les enfants autistes ont longuement connu l’abandon et l’enfermement dans les services très défavorisés d’anciens asiles d’aliénés où ils étaient, la plupart du temps, délaissés sans soins et sans éducation. Les seuls traitements utilisés en cas d’agitation étaient : la psychochirurgie (traitement des maladies et troubles mentaux par intervention chirurgicale sur l’encéphale) et les neuroleptiques (médicaments administrés dans le but de réduire ou atténuer certaines psychoses). Etant considérés comme des « dégénérés », ils furent victimes d’internement à vie. Ce sont des psychiatres, qui après la Seconde Guerre mondiale, fatigués des pratiques non humaines que les personnes atteintes de trouble autistique subissaient, décidèrent, avec l’aide de psychologues, éducateurs spécialisés, assistants sociaux et infirmiers, de transformer les services d’asiles en internats thérapeutiques.
Grâce à cette prise en charge plus intensive, développée et individualisée, les troubles divers, dont l’autisme, ont pu être étudiés et analysés de façon plus poussée. L’approche pathologique s’est alors développée, elle consistait à chercher à se mettre à la place du patient pour tenter de comprendre le monde de son point de vue. Elle permettait de mettre en place des hypothèses sur la signification d’un symptôme par exemple. Suite à cela, la France s’est vue appelée la « psychothérapie institutionnelle », rejoignant les pratiques américaines et anglaises.
Cette thérapie fut d’abord abordée avec les adultes puis par la suite avec les enfants. Dans la deuxième moitié du siècle, les pédopsychiatres ont privilégié des approches multidimensionnelles où la vie quotidienne (rythmée par des activités éducatives, pédagogiques et thérapeutiques) servait à l’enfant d’obtenir, à l’aide de compétences sociales et scolaires, un développement de son imagination.
Leur inclusion scolaire fut entreprise de manière isolée dès le début des années 80, mais fut généralisée par la loi Handicap du 1 février 2005 suite à l’initiative de pédopsychiatres. En parallèle, dans le secteur médico-social, des associations de familles d’enfants dits « inadaptés » étaient mises en place en collaboration avec des professionnels et accueillaient des enfants autistes dans des instituts médico-éducatifs (IME). L’enfant atteint de trouble autistique connaissait une évolution similaire, nonobstant certains obstacles administratifs, étant surmontés aujourd’hui, et travaillait en collaboration et en complémentarité avec le secteur sanitaire. Différentes formes de psychothérapies individuelles ou groupales ont cherché à aider l’enfant à mieux comprendre ses émotions et ses angoisses. Ces dernières ont premièrement été expérimentées aux Etats Unis et en Angleterre par deux écoles de psychanalystes, l’une fondée par la fille de Freud qui recommandait l’association d’une perspective éducative à la psychothérapie d’un enfant et l’autre de Mélanie Klein qui soutenait une approche uniquement interprétative (déjà réalisé avec succès en 1929). En France, les dispositifs de prise en charge ont été multipliés de façon inégale avec des moyens qui se sont révélés insuffisants suite à une progression rapide et qui maintenant ont subi une réduction radicale.
Après les années 1968, des oppositions s’instauraient entre le psychologique et l’organique, l’esprit et le corps, l’handicap et la maladie, l’éducation et le soin (psychologique=curable=maladie=soins exclusifs et organique=incurable=handicap=éducation spécialisée). Ces oppositions étaient entretenues par la séparation entre budgets sanitaires et médico-sociaux. Ce qui eut pour conséquence, une tendance à nier l’handicap et à ne tenir compte que de la psychologie.
Le programme TEACCH (Treatment and Education of Autistic and related Communication Handicapped CHildren), élaboré aux Etats Unis par Eric Schopler dans les années 1960, fut expérimenté par un petit nombre d’établissements médicosociaux en France, il fut l’objet de très nombreuses oppositions notamment de la part des psychanalystes les plus intègres. Ces oppositions s’atténuèrent avec le temps et le nombre d’enseignement de cette méthode se développa au fur et à mesure. La neurobiologie et la génétique restaient pauvres mais les recherches continuaient.
Un nouveau conflit éclata lorsque la méthode de Lovaas, appelée méthode comportementaliste, fit son apparition en France. Cette méthode, issue de la découverte des reflexes conditionnés par Pavlov, considérait l’intériorité psychique et inaccessible et réduisait le fonctionnement mental à une succession et généralisation de réponses à des stimulus. Aujourd’hui, ce modèle a inspiré une série de traitements de modification du comportement par un système de récompenses et de punitions : l’ABA (Applied Behavioral Analysis). L’ABA est appliqué de manière intensive à l’autisme (jusqu'à 40h par semaine) et a été présenté comme capable de ramener à la vie normale près de la moitié des enfants autistes dépistés précocement. Cette approche qui connut un grand succès dans les pays anglo-saxons et d’Europe du Nord, semble reculer pour des raisons économiques mais également en raisons des critiques reçues de la part des personnes atteintes du syndrome d’Asperger qui contestent cette méthode vécue par eux comme un conditionnement dégradant. Il est présenté en France comme le seul validé scientifiquement. Les parents, mécontents de la méthode analytique (psychanalyse) demandent d’avoir seuls le choix des traitements de leurs enfants et réclament le redéploiement des budgets actuellement consacrés à l’autisme vers le financement de méthodes leur convenant le mieux.
